3 questions à : Alain Liwerant - Président de DATASANTE

alain liwerantDirecteur du groupe MG France jusqu'en 2013

Docteur Alain LiwerantDocteur Alain Liwerant, vous êtes le Président de l'association DATASANTE, pouvez vous nous la présenter?

Data Santé est une association dont les responsables sont issus de MG France et MG Form, premier syndicat professionnel et plus important organisme de formation des médecins généralistes en France.

Tirant bénéfice d'un accompagnement actif de l'informatisation des médecins généralistes de notre pays depuis plus de 20 ans, carte vitale oblige, l'association est "spécialisée" dans ce domaine.

En clair, l'objet statutaire de Datasanté est de fournir des prestations de conseils, d’études, de mise en place et de suivi de systèmes d’information sous toutes leurs formes.

Plus précisément sous quelles formes ?

Recueillir les besoins, étudier les solutions concrètes à mettre en œuvre , établir le cahier des charges des besoins d’informatisation, suivre la réalisation et la mise en place des solutions retenues est notre cœur de mission.

Data Santé est une association francaise, agit-elle seule ?

En effet c'est une association française, mais nous agissons tout autant en national qu'en international. Notamment dans les pays du sud pour être présent auprès de nos confrères généralistes qui exercent en zone difficile ou isolée.

Nous pouvons intervenir seuls, mais en nous alliant avec d'autres, industriels ou ONG de développement, nous renforçons nos efficacités mutuelles. Rechercher des partenaires et contractualiser des accords autour de solutions informatiques efficaces dans le domaine de la santé fait aussi parti de nos missions statutaires.

3 questions à : Pierre Costes - Secrétaire général de DATASANTE

pierre costesPrésident de MG France
de 2000 à 2006

Docteur Pierre Costes, avec DATASANTE vous êtes particulièrement impliqué à Madagascar. Pouvez vous nous en dire quelques mots ?

Dans les 6 premiers mois d'expérimentation du programme d'informatisation mobile connectée de l'ONG Santé Sud à Madagascar, 5 Médecins Généralistes Communautaires ont créé plus de 4000 dossiers patients, ce qui traduit un usage quotidien de l'ordinateur.

Par ailleurs, les 25 Sauvegardes à distance, les 20 000 actes dans 65 relevés mensuels d'activité télé-transmis, les plus de 1000 messages électroniques échangés, signent un usage régulier de la connexion Internet via la clé 3G et le réseau GSM.

Aisées pour 4 MGC sur 5, les connexion sont quelquefois instables, passant souvent en 2 G, Edge ou GPRS, obligeant à réitérer les transmissions.

Quid de la formation continue pour ces généralistes exerçant en zone isolée rurale ou en brousse ?

D'après notre enquête sur ce point, tutoriels vidéo, anatomie interactive, documentation électronique résidente, logiciels d'aide à la décision sont massivement utilisés (80 à 100% des testeurs) tant pour la formation personnelle qu'en réunions en groupe d'échanges de pratique.

Une enquête menée par le Docteur Alain Libert auprès des étudiants suivant le programme de formation de Santé Sud à l'Université de Parakou au Bénin confirme cet intérêt.

Le besoin d'accélérer l'intégration de l'outil informatique dans l'exercice quotidien et la formation continue du médecin généraliste au sud est évident.

Un réel avenir pour le E-Learning ?

En effet, isolés géographiquement et professionnellement de la communauté médicale, éloignés des outils traditionnels de la formation continue, pauvres en documentations actualisées, les MGC peuvent tirer un profit maximum de l'informatisation et du « e-learning » du type « DPC.Net » proposé par MG Form aux Médecins Généralistes en France.

Sous deux conditions essentielles :

  • la première est de fournir un contenu médical adapté aux réalités pathologiques et logistique de l'exercice,
     
  • la deuxième est de mettre en place un dispositif technique adapté aux connexions quelquefois lentes ou erratique avec un enseignement combinant le mode connecté avec le mode « hors connexion » .

3 questions à : Mamy Rakotoninaly, responsable ONG SantéSud à Madagascar

mg mamy rakoMamy Rakotoninaly,
Chargé de mission Santé Sud,
Madagascar

Docteur Mamy Rakotoninaly, vous êtes en charge du suivi de la mise en place du réseau DATASANTEMADA, pouvez nous en dire plus ?

Datasanté à Madagascar est un programme d’informatisation mobile connecté en 3G des Médecins Généralistes Communautaires installés en zone rurale/brousse à Madagasca ( MGC ).

Ils expérimentent depuis 6 mois l'alimentation via internet d'une base de données de santé nommée Datasantémada. Chaque MGC du programme expérimental tient un dossier médical pour chaque patient.

Les totaux mensuels repris dans un Rapport Mensuel d'Activité (RMA) destiné au Ministère sont saisis en ligne sur une base de donnée. La base de donnée reprend à l'identique la classification du Rapport Mensuel d'Activité (RMA ) ministériel: tranche d'âge, diagnostic des maladies, et autres spécifications.

Quels résultats pour ce réseau naissant ?

La base de données Datasantémada recueille au jour de l'étude (21 Février 2013) :

  • 11324 consultations pour maladies sur 65 mois d'activité saisis.
  • Les 36 motifs de consultation sont classés en 5 tranches d'âge :
    • moins de 11 mois,
    • 1 à 4 ans,
    • 5 à 14 ans,
    • 15 à 24 ans,
    • plus de 25 ans.

Au sein de cette activité, on comptabilise

  • 9859 traitements prescrits,
  • 4365 enfants pesés dont 39% sont de faible poids et 8% de très faible poids.

Il faut rajouter

  • les 5750 actes de soins techniques,
  • les 1855 Consultations prénatales (CPN),
  • les 101 accouchements avec 105 enfants vivants ( 3 mort nés, 8 avortements )
  • l'activité de plannification familiale (PF)
    • dont 263 poses d'Implanon (implant contraceptif durant plusieurs années),
    • et 258 injections de Lofemenal (contraception injectable durant quelques mois).

soit près de 20 000 actes au total !

Et quels premiers enseignements peut on en tirer ?

Si le volume total de l'activité, médicale, obstétricale, pédiatrique peut sans réserve être analysé dans sa diversité ou sa répartition en tranche d'âge, il en est tout autre de la répartition par classification diagnostique.

En effet, la « nomenclature diagnostique » du ministère de la santé malgache en 36 catégories mélange motifs de consultation et diagnostic supposés ou certifiés. Les consultants viennent pour des affections aigües notamment respiratoires (31% des cas), digestives (16%).

Ces premiers résultats appellent sans conteste à poursuivre la mise en œuvre du réseau Datasantémada, et à mettre en œuvre une véritable méthodologie d'analyse.

3 questions à : Jocelyn Rakotozanany - Médecin Généraliste Communautaire à Madagascar

mg jocelyn rakoJocelyn Rakotozanany,
Médecin Généraliste Communautaire,
Madagascar

Docteur Jocelyn Rakotozanany, vous exercez en zone rurale à plusieurs heures de pistes difficiles de la première voie goudronnée. Pourtant vous animez le Réseau Epilepsie à Madagascar : le REM, pouvez vous en dire quelques mots ?

Si dans les pays du nord la prise en charge des patients épileptiques fait souvent intervenir le neurologue, il en est autrement chez nous en situation isolée.

Avec le REM les Médecins Généralistes Communautaires formés peuvent assurer cette tache avec des garanties de qualité.

Tache de soins et de traitement grâce au partenariat en «no profit, no lost» noué avec SANOFI pour l'accès aux antiépileptique, mais aussi tâche d’éducation de la population avec le REM TOUR.

Pouvez vous nous en dire plus sur ce « REM TOUR» ?

Pour les MGC du réseau, le « REM TOUR » ce sont chaque année des milliers de kilomètres d'un village à l'autre. Réunion publiques, projection de film, échanges afin que l'épilepsie quitte son image de possession ou de malédication pour devenir tout simplement une maladie qui se soigne.

Avec des résultats tangibles ?
En effet, avant et après « REM Tour » il n'y a pas photo ! Avant l'information, les tradi-praticiens et les sectes religieuses étaient le premier recours pour la prise en charge des épileptiques. Les milliers de questionnaires distribuées au cours du 3ème « REM TOUR », ont fait ressortir que désormais 90% des gens interrogés considèrent que l'épilepsie est une maladie et qu'il faut consulter un médecin en première intention.

Encourageant quand on sait que la précocité des traitements évite les séquelles. Pour autant avec une prévalence observée de 1.4/1000, les résultats restent cependant insuffisants au regard des résultats mondiaux de 11,29 pour mille. Les problèmes socio-économiques, le niveau d'étude insuffisant, la durée de traitement trop longue nécessitera encore beaucoup d'effort pour le réseau.